vendredi 31 août 2018

Les Tuchins: Essai historique relatant les révoltes des Tuchins en France entre 1360 et 1390. le Tuchin est celui qui tient la « touche », c’est-à-dire le bois ou le maquis. Il s'écarte donc du cadre social établi. Cette appellation ne signifie donc pas « celui qui tue les chiens » comme évoqué dans un épisode de 1965 de la populaire série télévisée « Thierry la Fronde ». On trouve pour la première fois le terme de tuchin dans une lettre de rémission accordée à deux habitants d’une paroisse du Cotentin pour le meurtre commis par un dénommé Jean Moissant « qui estoit devenu brigant ou tuchin de bois ». Ce meurtre, survenu vers 1356-1357, s’inscrit dans le contexte des actes de résistance commis par les paysans du Cotentin contre les exactions des garnisons anglo-navarraises. Le Tuchin n’est donc pas seulement celui qui se réfugie dans la « touche », mais c’est aussi celui qui prend les armes et tente de s’opposer aux pillages des compagnies de routiers. Ouvrage en vente chez Thebookeditions: https://www.thebookedition.com/fr/les-tuchins-p-360700.html

mercredi 10 août 2016

L'Union dans le crime - Histoire de l'itinéraire meurtrier de Michel Fourniret

« Pour Michel FOURNIRET, Monique OLIVIER a pu l'aider à assouvir cette recherche, Monique OLIVIER lui a donné le pouvoir, elle lui donne le phallus manquant, elle le soutient dans sa position narcissique, elle l'excitera sexuellement si nécessaire. Sa soumission apparente, sa collaboration, soit active, soit par le regard plutôt bienveillant qu'elle portera sur ses actes, sera une folie à deux où chacun donne à l'autre ce qui lui manque, leur union se fera dans le crime. » (Extrait du rapport de l'examen psychologique du couple des docteurs Colette PROUVOST et Hélène BONGRAND du 4 mars 2006.)
"L'union dans le crime". Editions TheBookEdition:
Dès sa sortie de prison le 22 octobre 1987 et après avoir purgé trois années et demie pour agressions sexuelles, Michel Fourniret et Monique Olivier s’installent à Saint-Cyr-les-Colons dans l’Yonne. Moins de deux mois plus tard, le 11 décembre, le couple enlève par ruse la jeune Isabelle Laville à Auxerre, la drogue et la conduise à leur domicile. Fourniret, qui jusqu’à cet instant n’avait pas tué, assassine sa malheureuse victime après l’avoir violée ou tenté de le faire. A partir de cette date et pendant une période de seize ans, d’abord avec la complicité de sa compagne puis seul, l’homme va enchaîner vols, agressions, enlèvements ou tentatives d’enlèvements de jeunes filles suivis de viols ou tentatives de viols et assassinats.

mardi 11 décembre 2012

Le Drame de Royat - L'affaire Lindecker

Si vous souhaitez commander cet ouvrage, vous pouvez télécharger le bon de commande en cliquant ICI.

vendredi 20 avril 2012

Vient de PARAÎTRE !

"Le drame de Royat - L'affaire Lindecker" vient de paraître aux Editions Le Manuscrit (Paris).
A Royat, petite commune résidentielle de la banlieue de Clermont-Ferrand, le lundi 12 mars 1956, le corps inanimé de Janine Lindecker est découvert à son domicile par son mari au retour de son travail.
Elle est décédée des suites de deux coups de feu tirés par une arme de poing.
Les enquêteurs, au fil de leurs investigations, concluent à l’existence de fortes présomptions de culpabilité pesant sur l’époux de la victime, Alfred Lindecker, ingénieur chez Michelin.
Celui-ci clame son innocence et exprime sa certitude que sa femme s’est suicidée. Le drame de Royat devient l’affaire Lindecker. Vous pouvez accéder à la présentation de l'ouvrage en cliquant ICI.

lundi 19 décembre 2011

Histoire de l'Islam: Les quatre premiers Califes

Toute l'histoire de l'Islam et du monde arabe sur le site Pour l'Histoire

En 632, à la mort du Prophète Mohammed (Mahomet), se pose l'inévitable question de sa succession. Il est évident que son statut de prophète n’ouvre pas droit à succession mais la question se pose pour son statut séculier de chef de la Oumma (la communauté des croyants).
Mohammed n'a pas désigné de successeur mais il a indiqué qu'Abou Bakr, un de ses plus fidèles compagnons et père d'Aïcha, sa jeune épouse préférée, dirigera la prière collective après sa mort.
Notons que, plus tard, les Chiites prétendront que le Prophète avait désigné son cousin Ali pour successeur.
De plus, Mohammed n'a pas d'héritier mâle or, selon la tradition, les qualités se transmettent par le sang entre mâles.
Il y a donc bien un problème de légitimité califale (littéralement le mot calife signifie en arabe celui qui suit, qui succède) d'autant qu'il n'existe aucune règle de succession en la matière.
L'enjeu est d'importance pour la jeune communauté des croyants car la mort du Prophète laisse apparaître très vite des dissensions en son sein. Tout d'abord, il y a l'affrontement entre Aïcha, dans la chambre de laquelle Mohammed est mort, et Fatima, la fille du défunt et épouse de Ali. Fatima estime devoir hériter des biens de son père.
Une autre tension se fait jour entre les premiers compagnons du Prophète venus avec lui de La Mecque à Médine, les émigrés (Mouhagirun), et les Médinois qui se sont ralliés,les Ansars. Les uns et les autres réclament la légitimité pour désigner parmi eux le premier successeur (nous parlerons désormais de Calife).
Abou Bakr appartient au groupe des émigrés. Il est généalogiste (nassab). C'est une fonction prestigieuse car le généalogiste est la mémoire vivante du groupe. Il interprète les rêves. En outre, il est Hakam, c'est-à-dire arbitre tribal. Abou Bakr est donc un homme remarquable surnommé Al Saddiq, le sincère, le fidèle parmi les fidèles. Il constitue un modèle du parfait musulman. Il semble qu'Abou Bakr se soit invité à une réunion des Ansars au cours de laquelle ces derniers se préparaient à désigner un calife en l'absence des émigrés de La Mecque. Finalement, sa sagesse parvient à éviter l'éclatement et il est désigné Calife. Plus modestement, Abou Bakr, prend le titre de successeur de l'Envoyé de Dieu.
Son califat est de courte durée (environ deux ans). Il affronte victorieusement plusieurs soulèvements de tribus. Ces troubles sont connus sous le nom de Ridda ou guerres d'apostasie (de reniement) car plusieurs personnages, dont une femme, tentent de revenir aux pratiques anté-islamiques. Abou Bakr meurt en 633 (ou 634).

Omar, un autre compagnon du Prophète, lui succède. Au titre de Calife de l'Envoyé de Dieu, il ajoute celui de Prince des Croyants (Amir el mouminin) qui suppose une fonction militaire et qui augure des futures conquêtes qu'il conduira. Son Califat dure dix ans (634-644). Il est marqué à la fois par une grande stabilité et les conquêtes qui font surgir le monde arabe sur la scène politique mondiale de l'époque.
La conversion à l'Islam d’Omar ressemble, d'une certaine manière, à la conversion de Paul au christianisme.
A La Mecque, Omar, qui était un ennemi acharné des premiers musulmans, aurait menacé sa sœur qui recevait chez elle un récitant du Coran. C'est à ce moment, mais les circonstances précises nous sont inconnues, qu'Omar, délaissant brusquement sa colère, se serait convertit pour devenir un des plus fidèles compagnons de Mohammed.
Omar lance la Oumma à la conquête de l'Irak, de la Syrie puis de l'Egypte. Quelles sont les raisons de cette brutale irruption des Arabes hors de leur péninsule ?
Les tribus bédouines vivaient, notamment, du commerce à longue distance et également de l'économie du butin. En outre, il n'était pas rare que celles qui manquaient de nourriture (gardons en mémoire les conditions climatiques particulièrement dures de la péninsule arabique) pratiquaient la razzia sur les biens et les troupeaux d'autres tribus. C'était une nécessité vitale. La communauté des croyants créée par Mohammed constitue une nouvelle forme de tribu dont les membres sont liés par la foi et non par le sang. Il est interdit aux musulmans de se faire la guerre entre eux. Dès lors que l'Islam se répand largement parmi les tribus arabes de la péninsule, le recours à la razzia et l'économie de butin deviennent impossibles avec toutes les conséquences qui en découlent. Il est donc urgent de se tourner au-delà des frontières. Les cibles privilégiées sont la fertile Mésopotamie sous domination Sassanide et la Syrie, également fertile, appartenant à l'empire byzantin. Les deux grands empires s'épuisent dans un affrontement quasi permanent. L'empire Sassanide est à bout de souffle. Quant aux Byzantins, l'intolérance religieuse de l'empereur de Constantinople fait des minorités chrétiennes dissidentes de Syrie des alliées potentielles des conquérants arabes qui sont reçus comme des libérateurs. Ce sentiment favorable aux conquérants est d'autant plus fort que les Musulmans ne se lancent pas dans des opérations de conversion forcée, tout au contraire. Nous en verrons, plus tard, les raisons.
Face à des armées impériales peu mobiles, peu motivées et souvent composées d'un grand nombre de mercenaires, les cavaliers arabes ont aisément le dessus. Ils attaquent par petits groupes très mobiles. La recherche du butin et surtout leur foi constituent de très fortes motivations.
Les Byzantins sont bousculés à Agnadayn en juillet 634. Damas tombe une première fois en 635 avant d'être reperdue puis reprise en 636. Cette même année, la bataille victorieuse du Yarmouk est décisive. La Palestine et la Syrie sont conquises. Jérusalem est prise en 638. Omar s'empresse de venir y prier. Après une première défaite à la bataille du Pont, les Arabes remportent en 637 une victoire capitale sur les Sassanides à Qadisiya. A partir de cet événement, tout s'enchaîne rapidement. Dès 638 ou 639, la capitale sassanide, Ctésiphon, est investie. Les Musulmans fondent deux villes : Koufa et Basra (Bassora). Ces cités sont des Misr, c'est-à-dire des camps militaires permanents qui servent de relais pour les étapes ultérieures de la conquête.
L'empereur sassanide se réfugie dans sa province stratégique du Khurasan. L'Arménie et la grande cité d’Edesse tombent en 639.
En 642, la totalité de la Mésopotamie, de l'Arménie, de la Syrie et de la Palestine sont aux mains des Arabes musulmans. Les conquérants frappent aux portes de l'Egypte byzantine.
Les Arabes remportent une première victoire sur les troupes Egypto-Byzantines à Pélouse en 639 et une seconde à Héliopolis en 640.
En 642, Alexandrie négocie sa reddition mais elle est reprise par les Byzantins en 646.
Dès 643, les Arabes créent le misr de Fustat qui devient leur capitale provinciale. Les conquérants s'apprêtent à marcher en direction de la Cyrénaïque.
Omar est mortellement blessé en 644 mais il a le temps d'organiser sa succession avant de mourir. Il crée un conseil de consultation de six membres dont font partie, notamment, Othman et Ali. Il est convenu que le successeur d'Omar sera désigné dans les trois jours suivant sa disparition.

Othman est nommé Calife. Son califat dure douze ans. Son œuvre centrale est la recension coranique dont les conséquences sont déterminantes pour l'avenir de la Oumma.
A la fois pour des motifs religieux et politiques, la mise par écrit du Coran constitue un enjeu capital. Ce travail de recension, qui dure plusieurs années, produit naturellement quelques conséquences. Le choix précis des mots et de leurs significations implique la fixation d'une lecture, d'une interprétation, du texte sacré. Cela met en cause le pouvoir des récitants (qourra) du Coran qui en détiennent jusqu'à présent la mémoire et la pureté. Les récitants reprochent au Calife de se livrer, par sa recension, à des nouveautés blâmables ( bid'a). Ali, qui a la réputation d'être un homme particulièrement pieux, a une lecture du Coran qui n'est pas celle retenue par Othman.
Outre le débat d'ordre théologique, la recension coranique a pour effet de mobiliser les lettrés et notamment les grammairiens dont le remarquable travail a contribué à faire de l'arabe une langue de culture de premier ordre. Pendant ce temps, la conquête se poursuit. Chypre est prise en 649.
Dans son exercice du pouvoir, Othman privilégie le lien du sang. Il distribue des terres aux membres de sa famille et nomme à des postes clés des proches. Son népotisme suscite de plus en plus d'hostilité et finit par lui être fatal. Une mutinerie éclate à Fustat en 656 à propos de la distribution des terres. Les mutins se rendent à Médine où réside le Calife. Ils mettent le siège devant sa résidence durant 40 jours. Finalement, Othman est assassiné. C'est la Fitna, la discorde, qui conduit à l'éclatement de la Oumma.

Ali est désigné Calife par les opposants d'Othman. Trois mois plus tard, une première révolte éclate. Elle est dirigée par deux anciens compagnons et par Aïcha. Cette dernière participe à la bataille dite du chameau. Les révoltés sont défaits et Aïcha assignée à résidence à Médine.
Un autre homme se dresse contre ‘Ali. Muwwiyya, gouverneur de Syrie et cousin d'Othman, accuse Ali de n'avoir pas vengé la mort de son prédécesseur et refuse de faire allégeance au nouveau Calife. Ce dernier le destitue de son poste de gouverneur mais Muwwiyya refuse sa destitution. Il brandit la chemise ensanglantée d'Othman lors d'un discours à la mosquée de Damas et se présente comme le vengeur du Calife assassiné. Il réclame le sang et non plus seulement le prix du sang comme le veut la tradition bédouine. Les deux armées s'affrontent à Siffin ( ), près de l'Euphrate, en 657. Le sort de la bataille est indécis. Le gouverneur de Damas propose un arbitrage, ce que refusent certains partisans de Ali en se fondant sur ce mot d'ordre : Il n'est de jugement que de Dieu ! Seul Dieu, selon eux, peut décider du sort des armes. Ils abandonnent Ali. Ces hommes sont qualifiés de Kharigites (ce qui signifie les exclus ou ceux qui s'excluent).
Ali accepte l'arbitrage qui a lieu à Adrah (près de Pétra) en 658. Il est déclaré que Othman a été tué injustement et que Ali aurait du venger sa mort. L'arbitrage est donc favorable à Muwwiyya et légitime sa désobéissance à Ali. La même année, les Kharigites sont écrasés à la bataille de Nahrawwan. Seuls quelques-uns parviennent à s'enfuir. La plupart des fugitifs trouvent refuge au Maghreb.
En 660, le vainqueur de Siffin se fait proclamer Calife. Damas devient résidence califale. Désormais, il y a deux Califes : Muwwiyya à Damas et Ali à Koufa, en Irak, où il s'est replié avec ses partisans.
Cette situation ne dure guère. En 661, Ali est assassiné par un Kharigite. Il était le quatrième et dernier des Califes bien guidés (Rachidun), compagnons du Prophète.
Dès lors, l'éclatement de la Oumma est consommé. Trois groupes en sortent : Les partisans de Muwwiyya, les plus nombreux (les Sunnites), les partisans de Ali (les Chiites) et les Kharigites.
Le siège califal quitte définitivement la presqu'île arabique.


Le califat Omayyade et la poursuite de la conquête


L'installation du califat omayyade à Damas* en 661 marque une rupture radicale avec le pouvoir des précédents califes bien guidés. L'influence byzantine se fait sentir par l’instauration d'une vie de cour et par le choix d’un certain nombre de chrétiens parmi les conseillers du Calife. Le nouveau pouvoir devient un mulk classique, c'est-à-dire un pouvoir monarchique traditionnel. L'arabité du cercle dirigeant l'emporte sur le caractère spécifiquement musulman du califat des anciens compagnons du Prophète. La solidité du régime tient à trois facteurs essentiels :
- L'homogénéité et la solidarité interne du noyau dirigeant (concept de asabiyya c'est-à-dire d'esprit de corps. Voir à ce sujet le concept développé par Ibn Khaldun.) qui reposent sur la loyauté des tribus arabes installées en Syrie. Muwwiyya consulte systématiquement les chefs tribaux locaux.
- La fidélité de l'armée.
- La loyauté des gouverneurs de province.
L'empire omayyade est d’abord un empire arabe avant d’être un empire musulman.
La poursuite et la consolidation de la conquête vont permettre à l’empire de fonctionner sur l'économie du butin. Une part des terres conquises est confisquée mais laissée en usufruit à leurs propriétaires originels contre versement d'un impôt, le raraj. Quant aux autres terres confisquées, elles tombent dans le domaine public du califat. Elles sont découpées en grands domaines et concédées à de grands exploitants musulmans appartenant aux tribus arabes contre le versement de l'usr, impôt égal au dixième des récoltes. Son montant est inférieur au kharaj. La conversion à l'islam d'un propriétaire local ne change pas son statut fiscal.
En outre, chaque chef de famille non-musulman est soumis à un impôt par tête, la jizya. La distinction économique qui est instaurée entre musulmans, essentiellement arabes, et non-musulmans est un facteur justifiant l'absence de politique du pouvoir en faveur des conversions massives à l'islam. A l'opposé, cette différence de statut fiscal peut, dans un certain nombre de cas, expliquer la volonté des non-musulmans à se convertir. Il convient de souligner que les populations locales non converties bénéficient en contrepartie de l'impôt, d'un statut de protection comportant, en théorie, des restrictions telles que l'accès à la fonction publique et à l'armée. Les nouveaux convertis sont appelés mawaali. Ils sont, conformément au mode de fonctionnement de la société arabe tribale, des clients de tribus. C'est une sorte de statut d'affiliation qui leur permet de devenir musulman mais tout en restant différents. Cette distinction entre mawaali et musulmans arabes ne va pas sans susciter des tensions et poser des problèmes. Il faut souligner que la religion des conquérants exerce un attrait particulièrement fort à l'égard des populations conquises pour des motifs qui ne sont pas exclusivement économiques ou politiques. L'islam est une religion sans mystères, sans clergé et dont la liturgie est très simple, contrairement au christianisme. Ceci explique, pour partie, la rapidité et le succès de la conquête arabo-musulmane. Peu à peu, les califes omayyades vont s'éloigner des réalités quotidiennes pour s'installer dans une vie de cour qui scandalise les gens pieux et, notamment, les partisans de Ali qui dénoncent l'illégitimité califale du pouvoir de Damas. Les califes successifs, tel Hishaam, ont tendance à déserter la capitale au profit des châteaux édifiés dans le désert. Les opérations militaires de la conquête qui ne cesse de se poursuivre sont le fait des gouverneurs de province. Le Calife est de moins en moins impliqué dans le processus d'expansion. Enfin, les tensions entre arabes issus des tribus conquérantes et nouveaux convertis s'exacerbent. Nonobstant les révoltes qui ébranlent l'empire, les conquêtes se poursuivent.
Entre 706 et 712, les villes de Boukhara et de Samarkand sont prises avec l'ensemble de la Transoxiane qui constitue une plaque tournante du commerce et de la circulation des hommes et des idées. L'Indus est franchi en 713. Du côté de l'ouest, le misr de Kairouan est créé en 670. l'Afrique du Nord est conquise, du moins partiellement, entre 695 et 698. En 711, Tariq ibn Ziyad (in arabic)franchit le détroit qui sépare l'Afrique de l'Europe et pénètre en Espagne. Le pays est conquis en cinq ans. Les Arabo-Berbères, appuyés par des combattants chrétiens, franchissent les Pyrénées et pénètrent dans ce qui n'est pas encore la France. Les conquérants sont arrêtés près de Poitiers en 732 en un lieu baptisé par les vaincus le champ des martyrs (Voir le magazine e.mag 1.) L'expansion musulmane a atteint son point le plus extrême en Occident. La conquête du Maghreb va se poursuivre, émaillée de nombreuses révoltes autochtones. Quant aux soulèvements internes à l'empire, ils sont d'ordre divers :
Tout d'abord, la révolte conduite par Abd Allah ibn Az Zoubayr, gouverneur du Hijaz. En 683, il refuse de faire allégeance à Damas et entre en dissidence. Les Omayyades s’emparent de Médine. Abd Allah se réfugie à La Mecque qui est assiégée. L'instabilité du régime de Damas permet au dissident de continuer à gouverner le Hijaz durant dix ans entre 683 et 693. Petit-fils d'Abou Bakr, Ab Allah ibn Az Zoubayr incarne une certaine légitimité califale et s'autoproclame Calife. On assiste, une nouvelle fois, à l'existence de deux califats. Cependant, en 693, Abd el Malik arrive au pouvoir à Damas et redresse la situation. Son armée s'empare de La Mecque. Abd Allah est tué.
Les révoltes Kharigites: Selon la tradition, elles sont le fait des neuf rescapés de la bataille de Nahrawwan. Sans entrer dans les détails, soulignons que pour les Kharigites le Calife ne peut être désigné que par la Oumma tout entière et que cette dignité échoit naturellement au meilleur d'entre-elle. Ils prônent une stricte égalité dans la foi entre Arabes et non Arabes, voire même entre hommes et femmes. Le devoir de soulêvement contre le pouvoir en place est posé comme une règle par les plus activistes. Les révoltes se produisent à partir de 682. Elles sont toutes écrasées. En 748, Abou Hamza, un chef Kharigite, est tué. Dès lors, les Kharigites se réfugient aux confins de l'empire, au Maghreb et à Oman.
Quant aux Alides, le problème se pose en termes différents mais toujours avec l'idée de l'illégitimité des califes Omayyades. Après la mort de Ali en 661, c'est son fils Hassan qui est investit Calife mais il accepte de faire allégeance à son rival Mu’wwiyya. Hassan se retire. A sa mort, en 680, son frère Hussein est sollicité par les partisans de feu son père pour prendre la tête du soulèvement qui se prépare contre le pouvoir de Damas. Il accepte et prend la route en direction de Koufa. Il fait halte à Karbala. Les Omayyades lui barrent la route et bloquent l'accès à l'Euphrate. Hussein et toute sa troupe sont massacrés le 10 octobre 680 (10 Muharram 61 de l'Hégire). D'autres révoltes secouent l'empire mais c'est celle des Abbassides, dont le foyer de révolte se trouve dans l'importante province du Khurasan, qui va avoir raison du régime en place en 750. A partir de cette date, le centre de l'empire se déplace de Damas vers Bagdad et cesse d'être exclusivement arabe pour devenir essentiellement musulman.

*Mosquée des Omayyades

Fondation de Bagdad

Durant les premières années du nouveau pouvoir abbasside, la capitale de l'empire est Kufa. En 758, le calife Al Mansur décide la fondation d'une nouvelle capitale, près de Ctésiphon, l'ancienne métropole sassanide. Située entre le Tigre et l'Euphrate, sur les grandes routes caravanières, la nouvelle capitale est d'abord baptisée Médinat el Mansur puis Médinat el Salam et Médinat el Mounawara (la ville ronde) avant de prendre son nom définitif, Bagdad. La création d'une nouvelle capitale est avant tout la manifestation de la puissance du nouveau pouvoir califal. Le choix du site est une affaire particulièrement délicate nécessitant de nombreuses consultations préalables. Le chantier mobilise près de 20 000 personnes. On n'éhésite pas à faire venir du marbre d'Italie. Chose rare à l'époque dans cette région, la ville est dotée de fortifications formées d'une double enceinte et d'un fossé sur le modèle des cités sassanides. Comme ces dernières, elle est de forme circulaire. Le cercle symbolise le soleil. Le Calife est installé au centre du cercle. Autour de la résidence califale, un large espace vide sépare le siège du pouvoir du reste de la ville. Les quartiers sont édifiés entre les deux murailles. Quatre portes donnent accès à la nouvelle capitale. Le souk, lieu traditionnel d'agitation, est rejeté à l'extérieur des murailles. Au fil des années, la ville se développe hors les murs. Au point culminant du rayonnement de l’empire abbaside, on estime que la ville a compté jusqu'à un million d'habitants.

L'empire Abbasside

Le califat Abbasside est caractérisé par la création d'institutions puissantes :
Tout d'abord, le Vizir. D'origine perse pour les uns ou arabe pour d'autres, le terme désigne une fonction que l'on pourrait, avec beaucoup de précautions, comparer à celle d’un chef de gouvernement. Le vizir est, au début, le secrétaire particulier du Calife mais le personnage va devenir peu à peu le chef de l'administration centrale qui va connaître un développement considérable au point que certains auteurs n'ont pas hésité à parler de bureaucratie d'empire.
Certains vizirs vont être des personnages très puissants tels ceux issus de la famille des Barmaki, originaires du nord de l'Afghanistan. La trop grande puissance prise par cette famille lui sera fatale. Le calife Arun Al Rachid décidera de les arrêter. Cette attitude califale semble traduire la volonté du pouvoir d'éviter la création d'une aristocratie.
Outre le vizir, l'administration se compose de plusieurs institutions, les diwans (bureaux, ministères).
Le premier d'entre eux est le Bayt al mal, le Trésor Public, qui comportent trois sections :
Le diwan al diya chargé de la perception de l'impôt (usr), le diwan al haraj et le diwan chargé du paiement des fonctionnaires. Chaque diwan est dirigé par un contrôleur, le Ziman.
Le second grand diwan est le diwan al Hatim. C'est le plus prestigieux. On y trouve les meilleurs calligraphes de l'empire qui se constitue au fil du temps une importante collection d'archives.
Le diwan al Zaïch (ministère de l'armée), le diwan al Barid (la poste) et d'autres tel le diwan al Dar (qui dirige les diwan des provinces) complètent le dispositif administratif de l'empire Abbasside.
L'empire Abbasside constitue un espace culturel où va se déployer une civilisation brillante* pendant plus de deux siècles. C'est la période classique. Le commerce est florissant. La culture s'épanouit au contact des civilisations arabo-musulmane et grecque. Les sciences religieuses* se développent parallèlement à une forme complexe et raffinée d'humanisme, de littérature et de savoir-vivre, l'Adab.
Cependant, l'instauration d'un pouvoir musulman rival se réclamant du chiisme en Egypte et l'arrivée des croisés en Palestine vont secouer l'empire et affaiblir le Califat de Bagdad.
Peu à peu, l'armée a tendance à devenir un corps relativement autonome qui, en outre, est investie progressivement par les Turcs. Ce phénomène constitue l'une des causes de l'isolement des Califes et de leur perte du pouvoir réel. Le Calife reste le maître nominal de l’empire mais le pouvoir réel est, progressivement, exercé par les chefs militaires d'origine turque. Qui sont ces Turcs qui s'emparent du pouvoir impérial et d'où viennent-ils ? Les Turcs Seljukides, appartenant à la confédération des Oghuz, viennent d'Asie centrale par deux voies contournant la mer Caspienne, l'une par le nord et l'autre par le sud.
La conquête Seljukide procède en deux étapes : La prise de la Transoxiane, puis du Khurasan dont la capitale, Nichapour, tombe entre leurs mains en 1038. Ispahan est prise en 1050. Désormais, s'ouvre devant eux la route de Bagdad. Le Calife abbasside veut se débarrasser des Bouyides qui contrôlent Bagdad et qui pourraient s'allier aux Fatimides d'Egypte dont l'ambition est le renversement des Abbassides et la réunification du monde musulman.
L'alliance avec les Seljukides fraîchement convertis à l'Islam sunnite s’impose donc. Les Turcs font leur entrée à Bagdad en 1055 en plein mois de Ramadan. Toghroul Beg fait allégeance, très formellement, au Calife, prend le titre de Sultan et s'installe au pouvoir jusqu'en 1063. Le Calife épouse même l'une de ses nièces ! Désormais, l'empire Abbasside est aux mains des Turcs même si, en apparence, le Calife en demeure le maître. Plusieurs Sultans vont se succéder. Le nouveau pouvoir se caractérise par un renouveau du sunnisme et un renforcement du pouvoir militaire favorisé, en particulier, par le fait que l'armée perçoit et utilise l'iqta, impôt versé par les exploitants des vastes terres concédées aux chefs militaires turcs.
Toutes ces évolutions se produisent dans un cadre géopolitique complexe. En Occident, le califat arabo-berbère de Cordoue est autonome. Il en est de même du califat fatimide d’Egypte. La Syrie et la Palestine sont en pleine anarchie avant d'être le théâtre des croisades, puis des contre-croisades. L'influence culturelle persane gagne du terrain à l'est de l'empire au détriment de l'ère culturelle arabe qui se déplace vers l'Ouest. L'arrivée de nouveaux envahisseurs venus des steppes d'Asie centrale va bouleverser la région. Les Mongols attaquent l'empire. Bagdad tombe en 1258. La ville est mise à sac. C'est la fin d'une brillante époque. Les Mamelouks d'Egypte stoppent les envahisseurs en Palestine à Ayn Jahat en 1260. Un peu plus tard, sous l'effet de la résistance turque et, peut-être, pour d'autres motifs peu élucidés, les Mongols se retirent de la région. Désormais, ce sont les Turcs, Seljukides puis Ottomans, qui vont incarner la puissance musulmane dans tout l'Est puis le Sud du bassin méditerranéen.

*Mosquée bâtie à l’initiative du Calife Al Mustansir.
*Palais des Abbassides à Bagdad


Croisades et contre croisades



Plusieurs motifs semblent être à l'origine des croisades chrétiennes en Orient. Première raison : La difficulté, voire l'interdiction, faite aux pèlerins chrétiens de se rendre à Jérusalem, sur les lieux du Saint-Sépulcre du fait de la présence musulmane. Deuxième explication : Le droit d'aînesse confisque au profit de l'aîné le droit de posséder un fief, écartant ainsi du droit de succession les cadets qui n'ont d'autres choix que de se tailler des fiefs seigneuriaux sur des terres étrangères. Troisième raison : L'église cherche à canaliser l'ardeur guerrière des chevaliers occidentaux en les mobilisant pour la délivrance du tombeau du Christ. Enfin, les empereurs byzantins, aux prises avec les Seljukides du Califat de Bagdad, font appel aux chrétiens d'Occident pour les aider à contenir la pression musulmane. En novembre 1095, le Pape Urbain II lance, à Clermont, la première croisade. Il accorde une indulgence plénière et l'effacement des dettes à tous ceux qui s'engageront. En 1096, deux catégories de croisés prennent le chemin de l’Orient : Les pauvres gens qui vont emprunter la route terrestre et semer leur chemin de massacres et de pillages (massacre des Juifs en Rhénanie, par exemple) et les chevaliers composant quatre groupes distincts. Ces cinq croisades se rejoignent à Constantinople. La rencontre entre l’empire byzantin, urbain, fastueux et cultivé, et les Occidentaux est brutale. Oubliant la raison initiale de leur expédition, les croisés se livrent au pillage de la capitale byzantine avant de fonder par la force des principautés. Le comté d’Edesse est créé en 1097 tandis qu'une armée poursuit sa route vers Antioche, point stratégique et symbolique. La ville tombe en 1098 au terme d'un long siège. Les croisés, vainqueurs, refusent de restituer la ville aux Byzantins et fondent la principauté d’Antioche.
Jérusalem est assiégée et capitule en 1099. Les croisés investissent la ville en massacrant Juifs et Musulmans et en se livrant à un pillage en règle. Godefroy de Bouillon fonde le royaume de Jérusalem. Dix ans plus tard, Tripoli (Liban) est prise par le comte de Toulouse, Raymond de Saint-Gilles, qui fonde le comté de Tripoli. Face à la relative apathie des dynasties musulmanes, les Zendguides réagissent.
En 1104, l'Ata Beg de Mossoul s'empare d'Alep avec la perspective d'attaquer les nouveaux états latins. Il s'empare de Baudoin, roi de Jérusalem qu’il libère contre rançon.
Zendgui succède à l'Ata Beg. Sa priorité est l’unification de la Syrie. Il vise Damas dont la prise lui assurera le contrôle de la route de Jérusalem. Il s'empare en 1144 d'Edesse. Cet événement déclenche la deuxième croisade dirigée par Louis VII et Conrad III. Les croisés ont Damas pour objectif. En fait, les Occidentaux ignorent la réalité politique de cette région. Ils pensent avoir en face d'eux un monde musulman unifié et solidaire. Il n'en est rien. Le califat Fatimide d'Egypte, d'obédience chiite s’oppose aux Seljukides sunnites de Bagdad. Damas est tenue par les Bourrides adversaires des Zendguides qui les menacent. Les Bourrides s’allient donc aux Francs. Le but initial des croisés n'a donc plus lieu d'être et la croisade échoue.
Le fils et successeur de Zendgui, Nur ed Din, poursuit la politique de son père assassiné en 1146. Il prend Damas en 1154. Il est appelé à l'aide par les Fatimides d'Egypte et diffère son offensive contre Jérusalem. Son alliance avec les Fatimides est une aubaine car il prend ainsi en tenaille les états latins coincés entre Egypte et Syrie. Nur ed Din meurt en 1174. Saladin, fils d'Ayyub, un Kurde gouverneur de Tikrit en Irak pour le compte des Seljukides, épouse la veuve de Nur ed Din.
Saladin s'empare temporairement d'Alep en 1186 et parvient à contrôler le Nord de la Syrie.
Profitant de l'accusation de profanation du tombeau du Prophète à Médine lancée contre Renaud de Châtillon retranché à Kerak, Saladin engage le combat contre les croisés. En 1187, les Occidentaux sont écrasés à Hittin. Renaud de Châtillon est décapité. Jérusalem est reprise aux croisés.
La chute de Jérusalem déclenche la troisième croisade conduite par Frédéric Barberousse, qui meurt en Anatolie par noyade, par Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion. L’aventure tourne à l'échec. Les croisés proposent la paix à Saladin. Le traité de Ramlah est signé sans que les Francs aient pu reprendre Jérusalem. Saladin meurt en 1193. Le sultanat Ayyubide entre en crise et se fragmente en quatre parties : Mossoul, Alep, Damas et Le Caire.
La quatrième croisade est lancée et commence, paradoxalement, par la prise de Constantinople par les croisés qui profitent de la crise de succession du Basileus. Le comte de Flandre s’installe sur le trône impérial byzantin tandis que le nouveau Basileus est réfugié à Nicée. Cette situation va durer cinquante ans.
Les cinquièmes et sixièmes croisades ont un résultat mitigé. Les croisés récupèrent Jérusalem en 1229 mais la reperdent en 1244, ce qui motive la septième croisade conduite par Saint Louis. Au Caire, le dernier sultan Ayyubide meurt. Sa veuve s'appuie sur des hommes qui vont fonder la dynastie des Mamelouks. La croisade est un échec. L'Occident renonce en 1291 à lancer de nouvelles expéditions. C'est la fin des croisades.



Croisades et jihad



L'arrivée des croisés en Syrie et Palestine a ravivé le débat autour du Jihad au sein du monde musulman.
Le mot jihad est dérivé de la racine arabe JHD qui exprime l'idée d'effort sur soi-même. Plus précisément, il faut lui donner le sens d'effort pour se rapprocher de Dieu. La théorie du jihad a été conçue trés tôt par les docteurs en science religieuse (les ulémas) qui distinguent deux catégories de jihad : Le majeur et le mineur. Le jihad majeur ou grand jihad est l’effort spirituel que chaque musulman doit faire sur lui-même pour se rapprocher de Dieu. Le jihad mineur ou petit jihad est l’action à mener à l'égard des non-musulmans. Les ulémas distinguent le petit jihad défensif et le petit jihad offensif.
A priori, seul le petit jihad défensif est préconisé par la majorité des ulémas. Il doit être mené, en principe par la prédication (dawa) et ce n’est qu’en cas d’échec qu'il convient de recourir au jihad offensif, c'est-à-dire à la guerre contre les infidèles. Dans cette dernière hypothèse, le mot jihad prend alors le sens de guerre juste.
Après 750, l'esprit de conquête s'apaise au sein du monde arabo-musulman. Le jihad offensif n'est plus à l'ordre du jour. Seul subsiste le jihad défensif qui se manifeste aux confins des frontières de l'empire au contact des Byzantins et également des Turcs en Transoxiane.
Sur ces frontières, des régles s'établissent de facto entre les musulmans et leurs voisins. Les accrochages locaux, les razzias sont le fait de combattants (les mouhjahdins) qui se paient sur le butin. Il ne s'agit plus d'opérations militaires de grande envergure.
Les incursions byzantines en Syrie ou l'irruption des dissidents chiites ne provoquent que des réactions défensives qui vont être fortement critiquées par le pouvoir fatimide d'Egypte et par ses émissaires ismaéliens, les du'at (voir le texte sur le califat fatimide d'Egypte). Peu à peu l'idée de relancer le jihad mineur offensif se fait jour.
Pourquoi les Abbassides ont-ils tardé à réagir face aux croisés ? Il semble qu'ils aient commis une erreur grave d'appréciation. Lorsque les premiers croisés pénètrent en Syrie, les musulmans pensent avoir en face d'eux leurs traditionnels adversaires, les Byzantins, qu'ils appellent les Roums (les Romains). Il ne s'agit donc, à leurs yeux, que d'un conflit armé supplémentaire sans autre signification. Ils mettent du temps à comprendre que les croisés sont des Francs venus d'Europe et dont la motivation officielle et affichée est d'ordre religieux. Les Francs veulent reconquérir, au nom de la Chrétienté, le tombeau du Christ à Jérusalem. Dès lorsque les musulmans prennent conscience que le combat a une nature religieuse, la notion de jihad offensif va prévaloir et fonder la vigueur et l'efficacité des contre-croisades que Saladin* va conduire.

Les polythéismes de l'anté-Islam


L’Arabie pré-islamique était polythéiste. La notion de sacré était centrale dans les cultes rendus aux divinités. La pratique cultuelle était toutefois différente entre les peuples nomades du Hijaz et les peuples sédentaires du sud de la presqu'île arabique.

1- Au Hijaz

Notion de sacré : La notion de sacré est fondamentalement ambiguë. Le sacré est une force impersonnelle et mystérieuse qui peut être bienfaisante ou malfaisante. Haram (interdit) s'oppose à Hallal (licite). Le hallal a pour but de rendre pur l'impur. Cela signifie que dans le haram il y a de l'impur. Il y a donc des rapports de force entre haram et hallal au centre desquels on peut placer le profane qui est un lieu neutre où s'annulent les forces du pur et de l'impur.
Dans l'anté-islam, le haram est diffus et impersonnel, informe. Il y a les djinns qui sont des forces invisibles et imperceptibles dont il faut se méfier car ils sont les premiers occupants de la terre. Ils sont nombreux, surtout dans les lieux humides, nocturnes, dans les cimetières. Ils sont associés au sous-sol. Les djinns représentent un sacré primitif. Le sacré concerne le temps et l'espace :
A la Mecque, le haram (la kaaba) est un des points où le sacré est enraciné. En s'éloignant du centre sacré, l'énergie se dégrade. Il existe donc des espaces sacrés comportant des zones fastes et néfastes (YaMaNa et SaAMa), la droite et la gauche, qui s'opposent par rapport à l'angle nord-est de la kaaba. Il est vraisemblable qu'il y avait un culte solaire très ancien au lieu de la kaaba. La circumvolution des pèlerins musulmans pourrait provenir de cet ancien culte solaire.

Les enclos sacrés : Sauf en Arabie du Sud, les temples sont de simples enclos de pierre. A l'intérieur, un ou plusieurs bayt-Al (maison de la divinité) sont dressés, symbolisant la présence des puissances protectrices. Parfois les bayt-Al sont des sources ou des arbres. La Mecque est un lieu sacré important qui explique le pèlerinage anté-islamique. La pierre noire de la Kaaba était un bayt-Al.
Des rites précédés d'abblutions purificatrices se déroulaient avant l'approche du lieu sacré (changement de vêtement, coupe des cheveux…). Des offrandes (animaux ou repas rituels) étaient faites à la divinité. Le principal élément de culte était la circulation (dawar, tawaf) ou procession entrecoupée de stations. Il ne semble pas que des prières étaient prononcées à cette occasion.

Sacralité du temps : Le calendrier anté-islamique était lunaire. Le mois intercalaire de rattrapage avec les années solaires a été supprimé par le Prophète. Il y avait quatre mois sacrés au cours desquels devaient cesser les combats.

Il n'y avait pas de clergé au Hijaz, contrairement à l'Arabie du Sud. Les chefs des clans assuraient le service cultuel assistés d'un personnel spécialisé, les kahin(s).

Chaque tribu avait ses propres divinités, certaines étant communes à plusieurs tribus. Le dieu Houbal, peut-être d'origine syrienne, est associé à la triade des déesses Al Ozza, Al Lat et Manat. Il y avait d'autres dieux tels Ouzal, Al Galsal, Al Ilah et Al Rahman. Une certaine hiérarchie divine laisse supposer l'apparition d'un hénothéisme.

2- Arabie du Sud :

Les divinités avaient un caractère astral. Le panthéon s'organisait autour de la triade formée de la Lune, du Soleil et de Vénus.
Les temples étaient des édifices et leur fonctionnement était assuré par des prêtres attitrés et spécialisés.
La société Sud-Arabique était sédentaire, ce qui explique une pratique cultuelle plus élaborée qu'au Hijaz.

Les communautés Juives en Arabie pré-islamique

Des communautés juives étaient implantées depuis plusieurs siècles dans la presqu’île arabique avant l’arrivée de l’Islam. Elles étaient surtout installées au Yémen.
Selon les historiens, ces communautés étaient soit des Hébreux ayant fuit la répression romaine au IIème siècle après JC, soit des Arabes judaïsés.

Ces communautés occupaient le chapelet des oasis Nord-Sud depuis la Syrie jusqu’au Yémen. Elles étaient protégées par des clans arabes (système du hilf) mais il est possible que cette situation était inversée plusieurs siècles avant.

Les implantations juives étaient importantes au Yémen. Il est possible que des Juifs convertis à l’Islam aient fait passer des notions judaïques (récits des prophètes par exemple) dans la tradition islamique. Les communautés juives étaient puissantes et très structurées, très conscientes de leur identité. Malgré cette spécificité identitaire, les structures sociales des tribus juives étaient les mêmes que celles des Arabes.

Les Chrétiens en Arabie pré-islamique
Les chrétiens en Arabie pré-islamique étaient moins nombreux et moins bien organisés que les communautés juives. C’était des occupants plus récents qui ont pénétré dans la presqu’île vers le IIIème siècle après J-C.
Le premier groupe était celui des Abyssins qui se répartissaient entre mercenaires et esclaves au service des Arabes, notamment à La Mecque.
Le second groupe était celui des Nabatéens (‘al Ambat) originaires de Pétra. Ils étaient spécialisés dans le commerce du blé, de l’huile d’olive et du vin.
Ils étaient soumis à une taxe, la gizya, qui était un impôt par tête sur les étrangers résidents en contrepartie de la protection des Arabes de La Mecque.
Il est vraisemblable qu’il y avait également des Arabes christianisés implantés en Arabie de longue date.
La principale implantation chrétienne était Najran, aux portes du Yémen. C’était des chrétiens monophysites, donc d’origine syrienne, qui avaient leur évêque.
Le monde chrétien des premiers siècles a été secoué de plusieurs dissidences et des débats théologiques se sont élaborés puis ont pris une certaine acuité lors de la conversion de l’empereur byzantin Constantin en 313 puis en 384 lorsque le christianisme est devenu religion d’Etat sous l’empereur Théodose.
A partir de ce moment, l’amalgame s’est fait entre religion et fidélité à l’empereur de Byzance. Les schismes et les répressions se sont succédées. Les tensions sont devenues très fortes au milieu du VIème siècle sous Justinien.
La hiérarchie gréco-chrétienne s’est opposée au christianisme populaire de culture non-grecque (Araméens, Coptes…).
La première grande controverse fut celle de l’arianisme. Arius diffusa une doctrine selon laquelle si Dieu est unique et inengendré, son Verbe, c’est-à-dire son fils Christ est créé. Christ n’était donc pas de la même nature que Dieu. Le concile de Nicée condamna l’arianisme et élabora le dogme de la Trinité selon lequel Dieu, Christ et l’Esprit Saint étaient l’expression d’une seule personne divine. L’arianisme s’installa néanmoins dans les Balkans et un peu en Europe Occidentale (les Wisigoths notamment).
La deuxième grande controverse est engagée par Nestorius Patriarche de Constantinople (Byzance). Nestorius posa le principe de la séparation des natures divine et humaine du Christ. C’était à la fois une contestation du dogme de l’incarnation selon lequel Dieu s’est fait homme en la personne de Jésus Christ et du dogme de la rédemption puisque selon Nestorius seule la nature humaine du Christ était morte sur la croix.
Le concile d’Ephèse de 431 condamna Nestorius. Ses partisans se réfugièrent dans l’empire Sassanide (en particulier l’actuel Irak.)
La troisième controverse fut celle du monophysisme. Eutychès déclara qu’après la crucifixion de Jésus il ne subsistait que sa nature divine, le divin ayant alors absorbé l’humain. Le concile de Chalcédoine condamna le monophysisme et excommunia Eutychès. Le monophysisme triompha en Arménie, en Syrie, en Egypte et au Soudan. Les Arabes pré-islamiques étaient donc au contact direct des chrétiens et plus particulièrement des dissidents monophysites et nestoriens.

mercredi 26 janvier 2011

Louis-Ferdinand Céline censuré

Sous la pression de groupes dont l'influence n'est plus à démontrer, le ministre de la culture a décidé de ne pas commémorer le cinquantième anniversaire de la mort de Louis-Ferdinand Céline au motif de son antisémitisme forcené. Céline était un antisémite délirant mais il a été également l'un des plus grands écrivains français du XXème siècle. Devons-nous l'écarter du panthéon de la République des Lettres parce qu'il était un salaud ? Dans ce cas, éliminons tous les écrivains et les poètes qui se sont faits les complices du stalinisme et du maoïsme; tous ceux qui se sont compromis dans des trafics, ceux qui ont justifié des massacres, des guerres et des occupations injustes. La France doit assumer son héritage, le passif comme l'actif. Réécrire l'Histoire à coup de censure et d'auto-flagellation est pitoyable et dangereux. Nous ne censurerons jamais assez au yeux de certains. Cessons ces reculades permanentes et prenons le courage de commémorer le grand écrivain que fut Céline.